Le plus célèbre des livres sur l’Afghanistan, , est sans aucun doute « Le libraire de Kaboul », de la journaliste norvégienne Asne Seierstad. C’est l’histoire de sa rencontre avec un libraire afghan, Sultan Khan, qui l’a invitée à vivre dans sa famille pour plusieurs mois à la suite du régime des Talibans (2001). Ce récit de vie afghane a rencontré un franc succès en Norvège et le livre est devenu meilleure vente, avant d’être publié dans plus de 20 pays. C’est là que commença la controverse de cette chronique saisissante.
Sultan Khan est un nom d’emprunt pour le Shah Mohammed Rais, un commerçant de Kaboul, plusieurs fois emprisonné, pillé, menacé, qui a réussi à faire fortune dans un pays où les trois quarts des habitants sont analphabètes...en vendant des livres. Homme cultivé, épris de poésie, Sultan est aussi le chef despotique d'un clan nombreux qui habite sous son toit. Ses deux épouses, leurs enfants, sa mère, ses frères et sœurs: tous dépendent de lui, devant obtenir son autorisation pour travailler, étudier ou se marier.
Il réagit brutalement lorsqu’on lui remet une copie du livre de Seierstad : il se déclare outré et dénonce le comportement de l’auteur, qui aurait abusé de son hospitalité en révélant des secrets de famille calomnieux. Pire encore, les allégations concernant les femmes de sa famille, qui auraient eu des aventures amoureuses, ont déshonoré le clan.
Les critiques occidentaux émettent également des doutes sur l’authenticité des caractères et des personnages puisque l’auteur en a finalement rencontré que très peu, et surtout ne maîtrisait pas le dari ; Seierstad elle-même n’apparaît nulle part dans le livre. Rais, ou encore Sultan Khan, a engagé à plusieurs reprises des poursuites judiciaires tandis que sa femme demandait le droit d’asile à la Suède, puisque le livre aurait mis la vie de sa famille en danger. Pour sa part, Seierstad a regretté ouvertement de ne pas avoir consulté Rais pour décider de la forme à donner au roman.